Lèvres d'ange... Souffle de dragon !
Détail d'une garvure de Robert Fludd 1574 -1637
|
!Expir
fulgurant!
Le
!Kiaï! de silence
«Le
manque d'énergie vitale rend les gens malades
: tout le monde est plus ou moins malade
aujourd'hui. Pourtant, on pourrait se guérir
soi-même, en exerçant son ki. Faire que,
comme dans le Kiaï (cri des samouraïs),
le ki et le corps soient en totale fusion...
L'expiration est la clé du budo. Et aussi l'art
d'utiliser son ki par la concentration.»
Taisen Deshimaru (1914-1982,
Maître fondateur du Zen
Soto pour l'Europe.)
("Zen et arts
martiaux" chez Albin Michel )
Dans la pratique de la Voie du Sarbacana,
le jet de flèche n'est le résultat d'aucune
sorte de tension, compression, ou rétention
préalable du souffle, tant au niveau de
la bouche qu'au niveau des poumons.
C'est tout au contraire
une impulsion puissante issue d'une totale
relaxation.
Lèvres d'ange... Souffle de dragon !
L'énergie du jet de souffle n'est pas
issue de la libération d'un verrouillage
musculaire, comme dans le tir à l'arc par
exemple. Le "jet" de sarbacane
jaillit d'une inspiration profonde, sans
tension aucune, juste une inspiration du
type de celles produites lors d'une méditation.
Et
c'est dans la coulée de cette paisible et
profonde inspiration que, tel le saut d'un
poisson dans le miroir d'une eau calme,
se produit le bond des muscles abdominaux.
Comme
un tigre bondissant du coeur de sa passivité
— jaillit le !kiaï! de silence.
Un
jet de silence pointu, dont le cri est la
flèche.
Aucune préparation, appréhension, avant ce jet
de souffle, juste
une inspiration
comme les
autres, qui — d'un coup — se transforme
en un expir fulgurant ! Un éclair de souffle
dans le ciel bleu de la respiration,
puis la respiration reprend son rythme
paisible, profond, régulier.
Cette
formidable percussion du souffle, est induite
sans la moindre parcelle d'agressivité.
C'est une force semblable au coup de marteau
du sculpteur, dont la puissance explosive
jaillit d'un esprit qui caresse les formes
du monde.
Comme le "raaan
!" qui accompagne la cognée du
bûcheron, dans la pratique des arts martiaux,
le "kiaï", le cri doit jaillir au
même instant que
l'émission d'énergie. Dans le Kyudô
( le tir à l'arc dans la voie du Zen), le Kiaï doit être produit
en même temps que le lâcher de flèche. Pour
Sarbacana, il en est de même, et il ne peut
en être autrement car le Kiaï est le lâcher de flèche. C'est le Kiaï qui dynamise la flèche. Sans
ce Kiaï, pas de flèche.
Le Kiaï est comme un laser de souffle,
il concentre l'énergie du Chi dans un étroit
espace du temps et de l'espace.
Le
tranchant du
souffle
Avec un arc, le projectile est issu
de la tension de l'instrument. Avec les
armes à feu, d'une explosion dans l'instrument.
Une
fois l'arc tendu, le coup peut s'échapper
à votre insu. Malencontreusement, le doigt
peut appuyer sur la gâchette d'une arme
à feu...
Mais
l'expiration qui projette un jet de sarbacane
ne peut se produire sans une intention particulière.
Explorer
les souffles qui induisent les différentes
formes "d'intention", c'est l'une des raisons d'être de la Voie
du Sarbacana.
Par ce saut de souffle, cet instantané-sursaut
de conscience, nous traversons le paradoxe
de la spontanéité car, en quelque sorte,
nous "choisissons" d'être spontanés.
Intention,
intuition, action sont alors totalement
synchronisées, il ne peut y avoir l'espace
d'une pensée entre eux.
Aucun espace entre
la décision et sa résolution.
Le tranchant du souffle
comme celui d'une épée,
Objectif-intuition-décision-action
—
un seul
souffle.
Cette maîtrise du souffle équilibrant
le corps, l'esprit et les émotions, crée
une parfaite cohérence dans la conscience
du souffleur, une parfaite unité dans le
"sarbacaneur".
Faisant de la Voie
du Sarbacana un formidable instrument d'apprentissage
de: "l'instant
juste",
"juste choix",
"juste décision".